Mireille avait suffisamment
d’humour pour se qualifier de „chasseuse de trophées“,
et rien ne l’amusait autant que de voir la physionomie du douanier
passer de la satisfaction au dépit en remarquant que non décidément
non la statuette emmaillotée dans la soie d'une chemise de nuit
ne relevait pas du recel d’œuvre d’art mais appartenait
à la catégorie des figurines sculptées par centaines
et mises en ventes dans un musée d’état comme le pouvait
être, réduites à une dimension acceptable pour une
étagère, les répliques en plâtre du David de
Michelangelo, du Sphinx de Giseh, en métal de la tour Eiffel, en
plastique de la fusée d’Hergé ou de n’importe
quel footballer au zénith de sa carrière, sans compter les
légions de fétiches industriels produits de part le monde.
L’avantage de cette acquisition officielle n’était
pas négligeable puisqu’il garantissait (et d’autant
plus que l’on s’éloignait du tropique du Cancer) l‘absence
de dynastes, de bostrichides ou autres grosses cétoines africaines
dans le bois. Quant aux larves xylophages européennes, un arsenal
tant chimique que naturel savait réduire à néant
toute velléité d’appropriation. Les crocs d’un
chiot par-contre savaient donner au trophée la marque d’une
indéniable authenticité.
Il devenait alors évident que la statuette avait été
taillée dans quelque recoin d’une brousse impénétrable,
et accompagné plusieurs générations de jeunes filles
avant que d’orner le buffet. |